BRESIL : les « christothèques » … au son de la musique électro catholique
Phénomène en plein essor depuis une dizaine d’années, les « christothèques » sont des soirées de musique électronique catholiques. Animées par des Djs qui se considèrent comme des acteurs de la nouvelle évangélisation, ces « balades saintes » attirent de plus en plus de jeunes désireux de se trémousser dans la « sainteté ».
Au milieu d’un nuage de fumée blanche balayé par des rayons lasers, le DJ Vitor Sales, 33 ans, la bible dans une main et le micro dans l’autre, prononce une prière. Il souhaite au demi-millier de jeunes qui sont massés au pied de la scène, de « s’amuser dans la sainteté« . Se tournant alors vers ses deux acolytes, Vitor Sales leur adresse un signe de la tête. C’est le moment qu’attendaient Vinicius Piedade de Souza, 27 ans, et André Moreira Jordan, 34 ans, déjà concentrés devant leur platine et leur ordinateur portable, pour lancer le premier morceau: « Dançando em Cristo » (Danse dans le Christ ). Soudain, depuis les murs d’enceintes qui encadrent la scène, jaillit une cascade assourdissante de rythmes électroniques. Bienvenue à la cristoteca (christothèque) ou « Ballade Sainte » de Bangu, un quartier périphérique, situé au nord de Rio de Janeiro.
Musique électronique et catéchèse
Mariage entre la musique « Electrohouse » et la catéchèse, les « cristotecas » sont des fêtes de musique électronique le plus souvent réalisées dans des salles paroissiales ou en plein air. Depuis une dizaine d’années, elles se sont multipliées dans les périphéries des grandes agglomérations brésiliennes, en particulier à Sao Paulo et Rio de Janeiro. Comme ici, à la Mocidade Indépendante (Jeunesse Indépendante) du Père Miguel, une sorte de grande halle polyvalente située au bord d’une route nationale, qui accueille aussi bien les fêtes paroissiales que les célébrations de messe.
« La musique en général a un pouvoir très important pour pénétrer le cœur des jeunes. Et lorsque cette musique a pour objectif d’annoncer la Parole de Dieu, il est évident qu’elle ne peut avoir qu’une excellente influence sur eux« , explique Vitor Sales, qui a découvert les christothèques lors d’une retraite spirituelle à Sao Paulo, en 2003 avec le Père DJ Zeton, LA référence pour les adeptes de musique électronique catholique. « Pour moi, cela a été une révélation, se souvient Vitor Sales. Je me suis dit : incroyable, il y a donc ça aussi dans mon Eglise! »
« Pastorale de l’Évangélisation Nocturne »
Vitor n’est pas le seul à s’enthousiasmer. Comme lui, des dizaines de jeunes à travers le Brésil se découvrent des vocations de « DJ évangélisateurs« . Et si, au début, la démarche a surpris un peu les autorités religieuses, la capacité de la musique électrohouse à attirer les jeunes vers l’Eglise a fini de convaincre la plupart des évêques. A l’image de Mgr Orani Joao Tempesta, l’archevêque de Rio de Janeiro, qui, assure Victor Sales, appuie totalement cette initiative. Une reconnaissance de l’épiscopat qui a même poussé les quelques 80 DJ du Brésil, dont une bonne moitié se trouve à Rio de Janeiro, à créer, en 2011 la « Pastorale de l’Évangélisation Nocturne« . Pour le plus grand bonheur des jeunes qui viennent participer à ces cristotecas.
Danser dans la sainteté
C’est le cas de Sabrina, 19 ans, en jeans et tee shirt à l’effigie des JMJ. « J’adore la musique électronique, mais je ne participe jamais à des ‘rave party’, car je suis contre l’usage de drogue et je trouve que les jeunes de mon âge flirtent trop facilement, explique cette étudiante. Ici, il n’y a rien de tout cela. Tout le monde s’amuse dans le respect de l’autre et dans l’amour du Seigneur. » Une chasteté d’ailleurs largement encouragée par les Djs. « Il y a un temps pour tout dans la vie. Il ne faut pas brûler les étapes« , assure André Moreira Jordan, l’un des trois compères. Et si des jeunes amoureux veulent quand même s’embrasser pendant la fête? « Cela n’arrive généralement pas, car les personnes qui viennent ici le font dans un esprit saint et seulement pour danser« .
Tubes catholiques remixés
C’est justement pour leur permettre de danser « sans ostentation » que Vinicius Piedade de Souza dédie une bonne partie de son temps libre à écouter des musiques. « Nous remixons des tubes d’artistes catholiques, généralement très connus au Brésil, que ce soient des prêtres chanteurs ou des laïques, détaille cet ingénieur système de profession. Nous entretenons globalement de bonnes relations avec les artistes dont nous utilisons les compositions. Certains ont été surpris au début, mais cela se passe bien car nous servons tous le Seigneur. En plus, pour certains de ces chanteurs, nos remix sont un moyen de les faire connaître d’avantage« . Avec succès, à en juger l’énergie déployée par les grappes de jeunes, manifestement transcendés par les rythmes syncopés. Du moins jusqu’à minuit, heure à laquelle se termine la soirée. Une « heure raisonnable » pour ces jeunes, assure Vitor Sales.
Source : info.catho.be